mercredi 17 décembre 2008

14eme jour: Paris brûle-t-il ?

Dieu merci, j’avais appris l’existence du blog de mon cousin faisant état de la situation. A défaut de pouvoir le joindre par téléphone, j’ai pu le localiser grâce à son blog. C’était inespéré. Sachez qu’ici c’était la panique, le chaos le plus complet. Pourquoi on a décidé de vivre à Paris, bordel de merde ?! C’est purement du suicide dans cette situation. Toujours est-il que pas mal d’évènements se sont déroulés du début de l’infection à aujourd’hui. Ça fait maintenant trois jours que nous sommes à Bailleul sur Thérain et l’ambiance, bien que tout aussi funèbre, parait beaucoup plus reposante comparée au tumulte de la métropole. On crèche actuellement chez Nico avec les autres Froidmontois. Je profite d’un moment d’accalmie pour vous raconter un peu ce qui s’est passé pendant cette semaine infernale. Je ne peux pas vous relater tous les détails en un seul post, mais voici le compte rendu de quelques jours de survie :

Ça a commencé dans la nuit du mardi 2 au mercredi 3 décembre comme vous devez déjà le savoir. La veille, j’étais avec Elise et tos. Tos devait repartir tôt le lendemain pour son stage. On avait passé une soirée tout ce qu’il y’a de plus normal. On s’était couché vers minuit. Environ 1 heure après, un fracas assourdissant se faisait entendre depuis l’avenue. Apparemment, une bagnole en avait percuté une autre. Ni une, ni deux, presque instinctivement, Elise et moi dévalions les escaliers quatre à quatre. Tos avais la tête dans le cul mais était néanmoins alerte. Nous traversions la cours pour arriver dans l’avenue. Une voiture était accidentée. Elle avait foncé dans un véhicule déjà garé. Un homme se tenait devant la porte du conducteur. Il essayait à première vue de faire sortir la personne qui était inconsciente. Nous n’étions pas les seuls à avoir été alertés par le bruit. Une dizaine de personnes accourait vers l’accident. Je m’approchais de la personne devant la portière :
« Je vais vous aider à ouvrir la portière… »
La personne se retourna d’un bloc. Son regard était étrangement vide, comme si elle n’avait plus de pupilles. Elle avait la démarche pantelante.
« Vous allez bien monsieur ? »
A ces mots, l’homme se jetait sur moi, la bave aux lèvres et hargneux. Tos, Elise ainsi que d’autres personnes essayaient tant bien que mal de m’arracher à ce fou. Une fois séparés, tos lui avait foutu une droite. L’homme s’étalait avant de se relever systématiquement, comme si le coup ne lui avait rien fait. Tout le monde se disait que quelque chose clochait. A peine le temps de cogiter qu’une quinzaine d’individus à la démarche et aux mêmes intentions de nuire arrivait lentement mais surement vers nous. Et là je me suis dis : « ce n’est pas entrain d’arriver, je rêve ». Toutes ces années à mater des films de zomblards et à jouer à resident evil se matérialisaient devant nous avec une logique effarante. C’était la panique. Tout le monde se dispersait. C’était chacun pour sa gueule semblait-il. Sans chercher à comprendre, nous nous précipitions chez nous et nous nous enfermions. Au bout d’un certain temps, la tension redescendait mais était toujours présente. Là, on s’était rendu compte que la personne était toujours prisonnière de sa voiture…et que j’avais perdu mon portable ! Bordel, faut que je perde mon portable à ce moment là (dans le stress, j’avais oublié qu’Elise et tos en avaient un mais on s’est rendu compte que ça ne changeait rien, le réseau étant tout simplement inexistant) ! Y retourner, c’était du suicide. Je me risquais à un coup d’œil dehors. Personne dans la cours mais des hurlements se faisaient entendre depuis l’avenue. Je m’avançais prudemment en entendant derrière moi tos et Elise me disant que c’était risqué de sortir. Je n’y prêtais pas attention. Et là, l’horreur ! Une horde de zombies hurlants et vociférant était pressée contre la grille, heureusement très solide. Mais pour combien de temps ? Presque tous les voisins étaient dans la cours. La panique se lisait dans leurs yeux. Je leur disais de se cloitrer chez eux et que la situation, pour ne rien cacher, était alarmante mais qu’il fallait néanmoins garder son sang froid. Garder son sang froid, plus facile à dire qu’à faire en de pareilles circonstances. Tous les gens rentraient chez eux en hâte et dans la panique générale, ce qui excitait encore plus les créatures derrières la grille. Nous avions presque passé une nuit blanche à essayer de comprendre le pourquoi du comment, tout en entendant les hurlements de la meute à proximité. Situation intolérable !
Dans la nuit, nous vîmes un grand nombre de personnes fuir par tous les moyens possibles. Fuir dans les ténèbres nuit nous enverrai à une mort certaine, d’autant plus qu’aucun lampadaire n’éclairait l’avenue. Peu à peu, le sommeil nous gagnait.
Le lendemain, on alluma la télé et nous étions surpris de voir que certaines chaînes continuaient à émettre. Les bulletins d’alertes nous intimaient de rester chez nous et nous incitaient dans le pire des cas à tirer dans la tête des envahisseurs. On n’avait pas de flingues, l’affaire était réglée… Nous nous décidions au bout d’un moment à chercher dans l’appart tout ce qui pouvait faire office d’arme. Tos transforma un manche à balai en pieux acéré. Elise pris des couteaux de cuisines et moi une grande variété de tournevis. Nous étions prêts mais pas assez, avec du recul. Toujours est-il que nous nous engagions prudemment dans la cours. Il n’y avait pas un bruit. C’est comme si il ne s’était rien passé. Arrivés dans l’avenue, nous avons vite déchanté. La horde s’était dispersée pendant la nuit, mais c’était l’enfer sur terre.
Pas âmes qui vivaient. Tout était abandonné. L’avenue était sans dessus-dessous. Un grand nombre de véhicules étaient abandonnés et accidentés, des cadavres et des détritus jonchaient le sol. On était dans un film de Romero ! On voyait quelques zombies marcher au loin mais ils ne constituaient pas de menace immédiate. Pas le temps d’être choqué par ce spectacle mortifère. Il fallait faire vite.
Objectif : aller chez un pote qui habite pas loin de chez nous. On s’est rendu compte en longeant les boutiques et magasins de l’avenue que ces derniers avaient purement et simplement été désertés. Nous marchions d’un pas mesuré tout en prenant garde à ce qui nous entourait. Le trajet jusqu’au boulevard Ornano s’est déroulé sans encombre à notre très grande surprise. Notre pote Stéphane nous avait accueilli à bras ouverts et était très soulagé de nous voir en vie. Je lui demandais où était Marie-Pierre son regard vide en disait long. Nous avions compris. Nous décidions de passer quelques jours chez lui. Nous étions plus en sécurité ici, sachant qu’il habitait au sixième étage.
Nous passâmes deux jours chez Stéphane. Il nous raconta, non sans émotions, la pénible décision qu’il avait prise d’abattre Marie-Pierre, ayant alors succombé à l’infection et s’étant transformée en créature sanguinaire. Nous écoutions son récit, bouche bée. Mais il semblait avoir repris le dessus depuis quelques jours et en parler lui faisait visiblement du bien.
On s’est dit par la suite qu’on serait plus en sécurité armés, si jamais on tentait quoique ce soit. Stéphane nous avait dit qu’il y avait une armurerie à proximité de chez lui. La prochaine étape c’était donc ça. L’armurerie se trouvait environ 500 mètres de chez lui.
Nous avions réussi à investir les lieux, à prendre le nécessaire en armes (pistolet, fusil à pompe) et en munitions quand le gérant, aillant réussit à survivre dans son magasin nous mis en joug. Paniqués, nous avons essayé de lui faire entendre raison en lui disant qu’il fallait se serrer les coudes. Apparemment sa politique c’était : chacun pour sa gueule. Sur quoi Il avait répondu par un coup de feu tuant Stéphane sur le coup (tos vous relatera en détail cet épisode tragique).
Après une semaine de survie et l’impossibilité de communiquer avec l’extérieur, nous sommes tombés par miracle sur le blog de Nico. Nous étions alors revenus entre temps chez nous, au 25 avenue de saint Ouen. La conversation msn entre Nico et moi avait été poignante mais malheureusement écourtée par une invasion dans la cours. Cet endroit n’était plus sur et se transformait peu à peu en piège à rats. La cours se remplissait peu à peu de zombies mais nous étions suffisamment vifs pour les contourner. C’était peut être bien notre dernière sortie. Nous nous étions au préalable entraîné au tir car nous ne pouvions pas nous improviser tireur d’élite par l’opération du saint esprit. Nous nous sommes donc exercer sur quelques zombies durant nos derniers jours sur paris avant d’entamer notre périple picard. C’était bien la moindre des choses, mêmes si les munitions n’étaient pas illimités.
Nous savions que c’était de la folie de sortir mais ça l’était encore plus de rester ici. Le 25 avenue de saint Ouen n’allait pas devenir notre tombeau ! L’avenue et les rues alentours n’étaient pas trop peuplées par ces saloperies, l’armée ayant plus ou moins repris le contrôle de cette zone (nous ne savions pas si s’en était de même pour le reste de la ville). Peut être que le gros des infectés se trouvait dans les endroits plus fréquentés en temps normal. Par exemple, il ne faisait logiquement pas bon du tout se promener aux alentours de saint Lazare et des halles pour ne citer que ces endroits. L’avenue étant blindée de véhicules, ce qui empêchait toute circulation. La décision était donc prise de tenter un raid jusqu’au périph pour dégoter une bagnole, car en l’état, la route jusqu’à celui-ci était impraticable en véhicule. Et encore nous ne savions pas tout à fait si la situation était la même sur le periph et sur l’autoroute. A pied il fallait rester vigilant en permanence, ne jamais relâcher son attention au risque de grossir les rangs des affamés. Ça devenait vraiment urgent de se barrer de la capitale car la situation devenait de plus en plus hostile. Il y’avait de plus en plus de cadavres jonchant le sol. Les rues devenaient de véritable charnier. Il fallait rajouter à ça l’odeur pestilentielle du à leur décomposition et vous avez une certaine idée de l’horreur à laquelle nous étions en proie.
Durant notre périple qui nous sembla durer une éternité, nous étions passés à proximité de gros gueuletons zombiesques vomitifs à souhait, qu’il ne fallait surtout pas déranger sous peine de finir à notre tour en hors d’œuvre. On a aussi croisé sur notre chemin le gérant homicide de l’armurerie. Je voulais l’abattre. Tos m’en a empêché. Je lui avais rappelé qu’il avait tué notre pote. Il me fit me rendre compte que le gérant avait désormais rejoint le monde des morts ambulants et que ça ne servait à rien de le « tuer ».
La panique se faisait de plus en plus intense au fur et à mesure de notre cheminement. Mais nous faisions tout notre possible pour passer inaperçu…en vain parfois. Nous avons même emprunté des vélib, abandonnés dans la panique, ce qui a grandement facilité notre trajet. Nous sommes finalement parvenus à rejoindre le periph et à trafiquer le démarrage d’une voiture à proximité de l’A1, non sans avoir bataillé ferme, avec l’aide de quelques survivants, devant des envahisseurs de plus en plus nombreux et voraces (ce qui donnait lieu à des affrontements très sanglants et épiques). Par la suite, la majorité de notre trajet consistait à zig zaguer, parfois péniblement, entre les véhicules abandonnés ou accidentés et à percuter violemment des silhouettes titubants en plein milieu de la route. Prochaine destination : FROIDMONT !
Je ne peux pas vous restituer l’intégralité de ce que nous avons vécu pendant cette semaine éprouvante car nous y serions encore. Peut être que nous posterons nos mémoires de ce périple sur le blog quand cette histoire se sera un peu tassée ! Dans tous les cas, il nous tarde de retrouver nos proches et nos potes. Pour ma part (à défaut d’avoir des nouvelles), je prie pour ma famille, qui, je l’espère, s’en est tiré.
Ce post est logiquement dédié à la mémoire de Stéphane et à Marie-Pierre. Puissiez-vous reposer en paix.


Jérémy D.

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